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Expulsion du locataire en bail commercial

L’expulsion d’un locataire commercial est une procédure exceptionnelle mais légale, réservée aux cas où le preneur ne respecte pas ses obligations essentielles.

Elle ne peut intervenir qu’au terme d’un processus encadré par le Code de commerce, impliquant des formalités précises et, en règle générale, une décision de justice. Du commandement de payer à l’intervention éventuelle de la force publique, en passant par les recours du locataire, cette procédure obéit à une logique rigoureuse qui protège à la fois les droits du bailleur et ceux du locataire.

 

Sommaire :

 

I. Les fondements juridiques de la procédure d’expulsion en bail commercial

A. La clause résolutoire dans le bail commercial 

La clause résolutoire est la pierre angulaire de la procédure d’expulsion. Elle  prévoit qu’en cas de manquement précis du locataire (loyers impayés, défaut  d’assurance, etc.), le contrat pourra être résilié de plein droit après une mise en  demeure restée infructueuse. Cette clause doit être expressément prévue dans le  bail, et ne peut produire d’effet sans formalité préalable, notamment un  commandement de payer ou de faire.

 

B. Les manquements pouvant justifier l’expulsion

Le manquement le plus fréquent est le non-paiement des loyers ou des charges.  D’autres fautes, comme une sous-location illicite, une activité non conforme à la  destination des lieux, ou encore des troubles de voisinage répétés, peuvent  également justifier une demande d’expulsion. En l’absence de clause résolutoire,  le bailleur devra s’appuyer sur une résiliation judiciaire, en démontrant la gravité du  manquement. 

 

II. Les étapes de la procédure d’expulsion 

A. Le commandement de payer ou de faire 

Ce commandement est la première étape indispensable lorsqu’une clause  résolutoire existe. Il doit être délivré par acte d’huissier et mentionner précisément  la faute reprochée, le délai pour régulariser (1 mois) et les conséquences en cas  d’inaction. Ce document offre au locataire une dernière chance de se mettre en  règle.

 

B. La saisine du juge

Si le locataire ne réagit pas dans le délai imparti, le bailleur doit saisir le tribunal  judiciaire pour constater l’acquisition de la clause résolutoire ou obtenir la  résiliation judiciaire du bail. C’est une étape obligatoire : l’expulsion ne peut jamais  être décidée unilatéralement par le bailleur.

 

C. Le jugement d’expulsion 

Le juge examine les faits, la régularité de la procédure et les arguments de défense  du locataire. Il peut : 

  • constater la résiliation du bail, 
  • accorder des délais de paiement ou de libération des lieux, rejeter la demande si la faute n’est pas jugée suffisamment grave. 

 

III. L’exécution de l’expulsion 

A. Commandement de quitter les lieux 

Une fois le jugement obtenu, le bailleur fait délivrer au locataire un commandement  de quitter les lieux, lui laissant un nouveau délai de deux mois. Ce délai peut être  prolongé si le juge l’a prévu dans sa décision.

 

B. Intervention de la force publique 

Si le locataire ne quitte pas les lieux à l’issue du délai, l’huissier peut demander  l’aide de la préfecture pour procéder à l’expulsion forcée. L’autorisation peut  prendre du temps et dépend de l’appréciation de l’administration. En attendant, le  locataire reste dans les lieux, souvent redevable d’une indemnité d’occupation. 

 

IV. Cas particuliers  

A. Trêve hivernale et expulsions commerciales 

Contrairement aux baux d’habitation, la trêve hivernale ne s’applique pas aux baux  commerciaux. Le bailleur peut donc obtenir et exécuter une décision d’expulsion  même entre le 1er novembre et le 31 mars. 

 

B. Abandon des lieux par le locataire 

Lorsqu’un local semble abandonné (absence prolongée, courrier non relevé,  locaux vides), le bailleur ne peut pas agir seul. Il doit engager une procédure  spécifique pour faire constater l’abandon par huissier, puis demander au juge  l’autorisation de reprendre possession des lieux.

 

V. Conséquences post-expulsion  

A. Sort des biens laissés dans les lieux 

Si le locataire laisse du mobilier ou du matériel, l’huissier doit en faire l’inventaire.  Ces biens peuvent être placés en garde-meuble ou faire l’objet d’une vente  judiciaire pour couvrir les dettes locatives. Le bailleur ne peut ni les conserver ni  les jeter sans respecter la procédure. 

 

B. Indemnités d’occupation 

Après résiliation du bail, toute présence dans les lieux est sans droit ni titre. Le  locataire doit alors payer une indemnité d’occupation, généralement égale au loyer  majoré. Cette somme peut être recouvrée comme une créance locative classique. 

 

VI. Droits du locataire face à l’expulsion  

A. Droit à un délai pour quitter les lieux 

Même si le juge prononce l’expulsion, il peut accorder au locataire jusqu’à 24 mois  de délai pour quitter les lieux, en fonction de sa situation économique et de sa  capacité à se reloger ou relocaliser son activité. 

B. Moyens de défense 

Le locataire dispose de plusieurs outils pour se défendre : contester la validité du  commandement, demander des délais, proposer un plan de règlement des dettes,  ou prouver que le manquement n’est pas suffisamment grave pour justifier une  expulsion. Il peut aussi invoquer un abus de droit si l’expulsion est manifestement  disproportionnée. 

 

Conclusion 

L’expulsion d’un locataire commercial, bien qu’encadrée, reste une procédure  lourde aux conséquences importantes pour les deux parties. Elle exige un strict  respect des formes juridiques, des délais et des droits de la défense. Si elle peut  apparaître comme une solution de dernier recours, elle doit toujours être menée  avec précaution et, idéalement, avec l’assistance d’un avocat ou d’un  professionnel de l’immobilier.

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