Comment forcer la vente d’un immeuble tenu par une SCI sans l’accord de l’unique coassocié ? Partie 1
La désignation d’un administrateur provisoire
La mésentente des époux, seuls associés de la SCI, peut entraîner d’importantes difficultés de gestion. Ils peuvent alors solliciter auprès du JAF la désignation d’un administrateur provisoire, sur le fondement de l’article 220-1 du Code civil.
En effet cet article dispose : « Si l’un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille, le juge aux affaires familiales peut prescrire toutes les mesures urgentes que requièrent ces intérêts. (…) Il peut notamment interdire à cet époux de faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition sur ses propres biens ou sur ceux de la communauté, meubles ou immeubles. Il peut aussi interdire le déplacement des meubles, sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personnel à l’un ou à l’autre des conjoints. (…) La durée des mesures prises en application du présent article doit être déterminée par le juge et ne saurait, prolongation éventuellement comprise, dépasser trois ans. »
Sur le fondement de cet article, la jurisprudence a autorisé le JAF à confier la gestion d’une SCI dont les associés sont mariés à un administrateur provisoire. Mais elle a exigé que soit démontré, conformément à la lettre de l’article, que l’un des époux manque gravement à ses devoirs et met ainsi en péril les intérêts de la famille. Cela survient notamment lorsque les deux époux sont associés à parts égales (50/50), ce qui crée une situation de blocage puisqu’il est nécessaire d’avoir l’unanimité pour prendre la moindre décision (CA Versailles, 2e ch, sect. 1, 21 nov. 2013). La Cour de cassation a elle aussi admis dans ces cas la désignation d’un administrateur provisoire à qui est confiée la gestion du patrimoine commun ou indivis (Cass. 1re civ. 3 avr. 2002, n° 99-20963 ; Cass. 1re civ., 5 nov. 1996, n° 94-14160.)
Enfin, la durée de la mission de l’administrateur provisoire, en application du dernier alinéa de l’article 220-1 précité, doit être déterminée et « ne saurait, prolongation éventuellement comprise, dépasser trois ans ».
L’abus d’égalité comme argument subsidiaire
Cet argument peut être invoqué quand les deux associés époux sont seuls associés et ont le même nombre de parts.
L’abus d’égalité est constitué si le désaccord systématique témoigne d’une attitude contraire à l’intérêt de la société, en ce qu’elle fait obstacle à l’adoption des décisions essentielles et d’un comportement adopté dans le seul but de favoriser les intérêts personnels.
La Cour de cassation a donc par exemple affirmé que constitue ainsi un abus d’égalité le refus systématique de voter la mise en réserve de bénéfices pour réaliser des financements essentiels pour la survie de la société (Com., 16 juin 1998, n° 96-13.997).