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L’intégration horizontale en droit fiscal : enjeux, mécanismes et perspectives

L’intégration fiscale horizontale permet à des sociétés sœurs françaises, détenues par une même société mère établie dans l’UE/EEE, de constituer un groupe fiscal sans qu’une mère intégrante soit résidente en France.

Ainsi, l’une des sœurs devient alors société mère du groupe pour les besoins du Code général des impôts (CGI), ce qui ouvre la voie à la consolidation des résultats et à divers retraitements intragroupes. Ce régime répond à une exigence de neutralité concurrentielle entre groupes purement domestiques et groupes transfrontaliers car les résultats fiscaux des différentes sociétés intégrées fiscalement seront cumulés afin de ne former qu’un seul et même résultat fiscal porté par la société mère.

 

Sommaire :

 

I. Cadre conceptuel et juridique de l’intégration horizontale

Par groupe horizontal, on entend un groupe formé par des sociétés françaises placées en parallèle sous le contrôle (≥ 95%) d’une entité mère non résidente située dans l’Union européenne ou l’EEE sous réserve d’une assistance administrative en matière fiscale. L’une des sœurs est désignée société mère du groupe, sans qu’il existe de détention capitalistique entre sœurs. Le CGI et la doctrine précisent la notion d’entité mère non résidente et encadrent la possibilité de se constituer en groupe dans ce schéma. 

Concernant le fondement, il se trouve à l’article 223 A du CGI (2e alinéa) et dans la doctrine du Bulletin officiel des finances publiques – Impôts dédiées aux groupes horizontaux. La réforme issue de la 2e LFR pour 2014 a aligné la législation française sur le droit de l’Union en permettant l’option horizontale sous conditions. Les commentaires administratifs détaillent notamment la qualité d’entité mère non résidente, l’exclusivité entre intégration verticale et horizontale, ainsi que des cas pratiques. 

Se conçoit alors une comparaison avec le droit fiscal européen appuyée par une étude du rôle de la CJUE. En effet, la reconnaissance de l’intégration horizontale est le fruit de la jurisprudence CJUE sur la liberté d’établissement : l’arrêt Papillon (2008) a condamné l’exclusion de sous-filiales françaises détenues via une entité étrangère dans le régime français d’intégration, amorçant dès lors l’ouverture aux schémas transfrontaliers. Aussi, l’arrêt SCA Group Holding (2014) a jugé discriminatoire, aux Pays-Bas, l’impossibilité de former une entité fiscale entre sociétés sœurs détenues par une mère UE sans établissement local ; cette décision a directement inspiré l’option horizontale française. Enfin, c’est dans un arrêt Steria (2015) que le juge européen a renforcé l’égalité de traitement entre filiales intégrables UE et filiales françaises pour certains retraitements, influençant ainsi l’évolution des règles de neutralisation en France. 

 

II. Enjeux fiscaux et pratiques de l’intégration horizontale

Le régime vise d’abord la compensation des résultats : les bénéfices d’une sœur peuvent absorber les déficits d’une autre, réduisant l’impôt sur les sociétés global du périmètre. En outre, il harmonise le traitement des flux intragroupe afin de limiter les frottements fiscaux au sein d’un même ensemble économique, tout en répondant aux exigences européennes de non-discrimination. 

Il faut aussi savoir que l’intégration impose une gouvernance documentaire exigeante (liasses groupes, suivis de déficits, états spécifiques). Paradoxalement, elle accroît la visibilité des flux pour l’administration (tableaux 2029 du dossier LIASSE GROUPE SD), ce qui suppose une discipline contractuelle et comptable intra-groupe rigoureuse. 

 

III. Mise en œuvre pratique de l’intégration horizontale

Concernant la procédure de mise en place, une des sociétés sœurs françaises est choisie pour devenir la société mère du groupe horizontal ; elle notifie l’option à l’administration (validité de 5 ans, renouvelable tacitement) et l’accord de l’entité mère non résidente doit être joint. Les conditions classiques d’intégration (assujettissement à l’impôt sur les sociétés, seuils de détention, mêmes dates de clôture, etc.) demeurent adaptées au schéma horizontal. 

Aussi, faut-il noter que l’intégration horizontale comprend des conséquences fiscales pour les sociétés intégrées. En effet, le groupe calcule un résultat d’ensemble et applique les neutralisations/retraitements prévus par le CGI et le BOFiP. Depuis la LF 2019, la France a ajusté certains neutralisations (notamment la QPFC sur cessions intragroupe), tout en maintenant d’autres mécanismes essentiels. Les dispositions traitent aussi de situations impliquant l’entité mère non résidente ou des sociétés étrangères liées, pour éviter doubles déductions ou doubles non-impositions (ex : provisions intra-groupe). 

 

IV. Limites et perspectives d’évolution

Ce régime reste réservé aux groupes dont la mère est située dans l’UE/EEE et éligible à l’assistance administrative. Les groupes avec une mère située hors UE/EEE, tel qu’en Suisse, ne peuvent pas opter, ce que la jurisprudence interne a confirmé. Par ailleurs, l’option horizontale est exclusive de la verticale : il faut ainsi arbitrer selon la cartographie du groupe. Enfin, des contraintes techniques subsistent telles qu’un calendrier de clôture, un suivi des déficits ou encore les effets en cas de restructurations. 

Aussi, les ajustements récents de doctrine montrent une stabilisation, mais aussi des affinages réguliers (exemples chiffrés 2024 sur le retranchement de distributions lorsque les sociétés remplissent les conditions d’un groupe horizontal). 

 

V. Foire aux questions (FAQ)

1) Quelle est la différence entre l’intégration fiscale horizontale et l’intégration verticale ?

La verticale suppose une mère intégrante française détenant ses filiales à ≥ 95 %. L’horizontale réunit des sociétés sœurs françaises détenues par une mère non résidente UE/EEE ; l’une des sœurs devient « société mère » pour le groupe. L’option horizontale est exclusive de la verticale.  

2) Quelles sont les conditions pour bénéficier du régime horizontal en France ?

Outre l’assujettissement à l’IS, la détention à 95 % par une entité mère non résidente UE/EEE (avec assistance administrative) et l’accord de cette entité, il faut des exercices de même durée et clôture, ainsi que le respect des obligations déclaratives propres au groupe.  

 

3) Quels avantages fiscaux ce régime permet-il d’obtenir ?

Principalement la compensation bénéfices/déficits au niveau du résultat d’ensemble et des neutralisations de certains flux intragroupes, dans les limites fixées par la loi et la doctrine, régulièrement actualisées (ex : ajustements opérés par la LF 2019).  

4) Comment l’administration fiscale contrôle-t-elle les groupes horizontaux ?

Par le biais de la liasse groupe et des tableaux 2029 (périmètre, subventions, plus-values, déficits), qui assurent la traçabilité des retraitements et la cohérence des flux. Une documentation intra-groupe robuste est indispensable.  

5) L’intégration horizontale est-elle compatible avec le droit européen ?

Oui, elle est la traduction des principes dégagés par la CJUE (Papillon, SCA Group, Steria) en matière de liberté d’établissement et d’égalité de traitement des groupes transfrontaliers.  

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